Voilà une réédition qui tombe à pic alors que, hélas, Pete Shelley vient de nous quitter, le 6 décembre dernier. L’année 1978 fût le vrai boum des Buzzcocks qui les a vu sortir coup sur coup leurs deux premiers « vrais » albums (on y reviendra). Le premier d’entre eux, « Another music in a different kitchen » qui nous occupe aujourd’hui s’impose comme un coup de poing, non seulement assommant, mais également retors et vicieux. D’entrée de jeu, avec un « Fast Cars » au titre fort à propos, le groupe part vite et fort. Un départ étourdissant qui colle l’auditeur au mur, mais, loin d’être au bout de nos surprises, en grattant la surface, on découvre la substantifique moelle du groupe. Car derrière le mur de guitares saturées, un groupe pop se fait jour, (le hook formidable de « Get your own », la pop sixties géniale mais vitriolée de « I don’t mind ») ce qui, d’emblée, place le quatuor dans le haut du panier de la scène punk (cf. « I need »), à équidistance de la power pop. Et ce n’est pas tout, car au fil des titres, une oreille attentive découvre une autre obsession, celle du krautrock, qui transforme radicalement les musiciens en laborantins obsédés par la répétition hypnotique et l’expérimentation mi-sonique/mi bruitiste (« Sixteen », « Fiction romance »). Une démarche qui culmine avec « Moving away from the pulsebeat » incroyable final de sept minutes animé d’ambitions contraires qui, surprise, finissent par fonctionner de pair, dans la foulée d’un batteur survolté (et seul à la manœuvre pendant le pont). En dépit de ses faiblesses (un côté brouillon assumé), de ses absences, cette « autre » musique dans une cuisine « différente » se révèle profondément attachante.
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