Ce disque est en fait une compilation regroupant deux albums distincts de Millie Jackson, une chanteuse soul née en 1944. En l’espèce, l’idée d’accoler ces deux disques est particulièrement bien vue, l’ensemble constituant une sorte de diptyque, un sommet de ce que l’on pourrait appeler la soul adultérine (par contre réutiliser le visuel d’un autre album de Millie « It hurts so good » – 1973 – prête un peu à confusion). Les affaires de cœur secrètes sont portées ici au pinacle. Tout débute avec la relecture somptueuse du classique « (If loving you is wrong) I don’t want to be right ». Ce titre sert de point de départ à l’intrique de ce disque, particulièrement cinématographique, car on a véritablement affaire à une histoire. Tout au long de ces 17 titres, Millie adopte le point de vue d’une femme amoureuse d’un homme marié avec lequel elle entretient une liaison secrète. L’album explore les différents états d’âme du personnage, les titres s’enchaînent sans temps mort, chaque chanson étant un nouveau développement du scénario. Ainsi le funk brutal de « All i want is a fighting chance » voit le personnage de Minnie s’étriper avec la femme « officielle » alors que le titre suivant fait montre du dépit d’une femme fatiguée de se cacher (« I’m tired of Hiding »), dépit exprimé auprès de son amant ; « It’s all over but the shouting » clôturant provisoirement les comptes. Les ambiances du disque sont variées allant d’une soul langoureuse et mélancolique richement arrangée à grandes lampées de cordes (« I’m through trying to prove my love to you ») à un son plus groove et musclé (« All i want is a fighting chance »). Mais qu’importe le flacon, Millie et son grain de voix éraillé, rauque, charme l’auditeur du début à la fin. Un véritable album de soul dans le sens où les émotions affluent à travers le chant passionné de Millie. Sorti un an plus tard, en 1975, « Still Caught Up » surfe toujours cette vague adultérine et tente de prolonger l’intrigue sans atteindre les sommets explorés par le premier disque et s’essoufflant vers la fin. Cette double sortie vaudra à Millie un image sulfureuse dont le point d’orgue sera l’album, au titre évocateur, « Feelin’ bitchy » (1977) orné d’une pochette vulgaire.
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