Parmi les figures remises en lumière par le récent excellent documentaire « Rumble » consacré à l’apport des Amérindiens à la musique étasunienne, le guitariste Jesse Ed Davis figure en bonne place. Un hommage succinct, tardif mais ô combien bienvenu pour ce sideman recherché dans ses grandes heures. Jesse a débuté aux côtés de Taj Mahal à la fin des années 1960 avant de côtoyer l’aristocratie du rock, les Dylan, Lennon et autres Rolling Stones ; il était le seul Amérindien dans ce cas. Un atavisme qui pourrait expliquer bien des choses, un sens du groove inné, peut-être directement venu de la culture du rythme des Amérindiens, et un trop plein d’émotivité dans son jeu de guitare, une conséquence indirecte du racisme latent dont sa communauté a souffert. Dans son parcours assez bref, une année aura compté, 1968, l’année de la bacchanale filmée « Rock rock’n’roll circus » des Rolling Stones à laquelle Jesse a participé en qualité de guitariste de Taj Mahal. Les portes se sont grandes ouvertes pour le guitariste par la suite. Concert pour le Bangladesh en compagnie d’Eric Clapton, musicien de sessions aux côtés des ex-Beatles en solo, de Bob Dylan ou de Jackson Browne sur le premier album de ce dernier. Une période dorée pour le musicien mais aussi le début de sa descente aux enfers, sous la forme de diverses addictions. A ses heures perdues, Davis a également enregistré en solo. Une discographie maigre, trois albums seulement, mais ô combien lumineuse. Entouré d’un casting absolument dingue (Dr John, Leon Russell, Jim Keltner, Merry Clayton, Eric Clapton, Joel Scott Hill, Donald « Duck » Dunn, Ben Sidran) Davis a gravé trois merveilles de rock/soul 70s. On y retrouve toute la sensibilité du musicien, son sens du groove unique, travaillant toujours pour le bienfait supérieur de la chanson. Ses interventions sont justes, toujours à-propos, enluminent le contexte général d’une émotion palpable faisant vibrer la corde sensible de l’auditeur. Hélas, dès la fin des années 1970, la fête est finie pour Jesse, junkie accro qui ne s’est jamais vraiment remis de la mort de Lennon. Alors qu’il se relançait aux côtés du poète amérindien John Trudell (deux albums en commun) Jessie Ed Davis est retrouvé sans vie le 22 juin 1988 dans une buanderie de Los Angeles, victime d’overdose d’héroïne et d’alcool. Une bien triste fin pour un guitariste hors du commun que l’on peut toujours admirer en action, chair et os sur les dvds « Rock n’roll Circus » des Rolling Stones et « Concert for Bangladesh » de George Harrison.
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