Au fur et à mesure qu’il s’avance dans la décennie 1970, la formation instrumentale menée par Gilbert Artman (qui présente la particularité d’être à la fois batteur et claviériste) se singularise jusqu’à trouver un cheminement musical personnel. Ainsi, ce troisième et dernier album du groupe (avant la reformation et l’exhumation d’archives diverses), est pour le moins singulier. Dans les faits, le jazz progressif des débuts semble bien loin en 1977, et, avec cet album, Lard Free s’enfonce dans les méandres de l’avant-garde expérimentale. L’album se compose, en tout et pour tout, de deux titres. L’angoissante et assez sombre « Spirale Malax » occupe l’entièreté de la première face ; « Synthetic Seasons » (divisée en trois parties) la deuxième. La chose relève du maelstrom hypnotique. Point de chansons, ni de paroles. Mené sur un rythme quasi-tribal, les nappes synthétiques occupent l’espace et constituent le lit sur lequel guitare et clarinette tournent en boucle. Arrivé à ce stade on ne sait plus trop si les musiciens jouent ensemble. Un peu comme si chacun dans leur coin, chacun détenait une pièce du puzzle, malmenée dans tous les sens, et que chaque élément finissait par former un grand tout angoissant et apocalyptique. A l’image de la montagne de déchets présentés sur la pochette, c’est à une vision dystopique du monde que nous invite le groupe et, avec le recul des années, la chose semble maintenant prophétique. On ne dira donc pas de cet album qu’il est facile d’accès ou simple à écouter. C’est tout l’inverse, il est plutôt ardu. Mais il se révèle fascinant, hypnotique et tourneboulant, pour quiconque à le courage de s’y accrocher.
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