Les Qui ? Les Guess Who, quatuor qui m’a un jour été présenté comme les « Beatles Canadiens » par un disquaire indépendant et passionné, hélas fermé depuis (RIP Soul Kitchen), à côté de la fac. Plus que les Beatles, on pense plutôt au rock plus lourd dont Led Zeppelin s’était fait le champion à la même époque de l’autre côté de l’Atlantique. Et l’étiquette serait encore trop respective… Le début de l’album est fantastique et fait montre de toute l’étendue du répertoire des Guess Who. Cela commence plutôt tranquillement avec l’intro acoustique de « American Woman », les influences blues sont prégnantes, et le chanteur Burton Cummings donne de la voix avec talent. Puis vient le « hum » caractéristique du chanteur et d’un coup d’un seul les chevaux sont lâchés. Attaque de la guitare, pulsation de la section rythmique et chant « viril » de Cummings et la chanson est transformée en rock lourd et puissant propre à défier sur son propre terrain la bande à Jimmy Page. Du grand art. Et on encore rien entendu puisqu’on en est toujours, rappelons-le, au premier titre. Vient ensuite « No Time » une gentille ballade, un autre point fort du groupe enchaîné avec « Talisman », une incursion dans le folk psychédélique. Voilà, l’album a débuté depuis 10 minutes et on reste coi devant une telle diversité qui reste pourtant d’une remarquable cohérence. Le quatuor est suffisamment sûr de sa force pour s’approprier n’importe quel style et le faire sien. Mais, c’est l’heure de l’enchaînement « No Sugar Tonight/New Mother Nature », une autre grande réussite du disque. A l’origine, les deux morceaux sont acoustiques et pourtant le guitariste Randy Bachman attaque ses cordes comme s’il disposait d’un mur d’enceintes à sa disposition, bien aidé dans sa tâche par une section rythmique en pleine combustion. Les Guess Who restent ce groupe hyper tranchant que les guitares soient branchées ou non. Très intéressant. Ajoutez à cela un instrumental jazzy « 969 », encore une démonstration de dextérité de ces musiciens décidément très talentueux. Impossible de terminer cette chronique sans évoquer « Proper Stranger », une évocation de la dureté de Chicago où a été enregistré l’album. Le disque se termine comme il a commencé avec une version d’ « American Woman » teinté de blues (« Humpty’s blues »). Ce septième album sera celui de la consécration pour le groupe, actif depuis 1965, qui décroche enfin la timbale. Hélas le disque signera également la fin d’une époque, le guitariste Randy Bachman, un élément essentiel dans la signature musicale du groupe, quittera le navire peu après la tournée suivant la sortie. Les Guess Who ne seront plus jamais vraiment les mêmes après. Le groupe se séparera définitivement cinq ans plus tard, en 1975.
En bonus, « These Eyes », une de mes préférées, qui n’est pas sur l’album.
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